"L'esprit du Familistère, c'est fini. C'était des habitations pour des ouvriers et maintenant on est cinq dans un tel bâtiment", déplore Pierre Lemaire, 82 ans, qui vit dans le pavillon central depuis 60 ans.
"C'était une ville dans la ville. On était entre amis, entre collègues de travail et on se connaissait depuis plusieurs générations, c'était très convivial. Chacun avait son lopin de terre dans les jardins ouvriers", poursuit le Familistérien, entré à l'usine Godin à l'âge de 16 ans, comme avant lui ses grands-parents, son père et son beau-père.
Fabricant de poêles de chauffage en fonte et adepte du fouriérisme, Godin a édifié son "palais social" entre 1856 et 1883, à deux pas de l'usine, qui comptait aussi des écoles mixtes et obligatoires, un théâtre, un kiosque à musique, un lavoir, des commerces appelés économats, ou encore une crèche.
L'industriel résida lui-même dans un des quatre bâtiments en briques qui abritaient 500 appartements identiques pour les ouvriers et les ingénieurs.
"Pour faire les travaux, certains habitants ont été relogés, d'autres ont été aidés à partir, on va dire", explique Claudine Bidoux, 67 ans, ancienne Familistérienne.
Son frère, Hervé Leleux, 64 ans, qui a tenu à rester, fait les comptes de la fenêtre de son appartement au premier étage : "six (habitants) dans le central, une vingtaine dans l'aile droite. Celui-là, il a plus de 90 ans, celle-là aussi. Ce sont beaucoup de personnes âgées".
La porte de son habitation, où une feuille de papier indique "Appartement occupé", est séparée du musée par des barrières.
"Une expropriation"
Alors que la cour et la verrière du central ont été refaites à neuf, l'aile droite semble complètement à l'abandon, avec ses vitres cassées et des tags recouvrant les escaliers.
Dans le cadre du programme Utopia, 70 logements devraient y être restaurés, tandis que des travaux pour transformer l'aile gauche, inhabitée pour des raisons sanitaires, en hôtel "multi-standards" doivent débuter à l'automne 2013.
"D'abord le musée, et puis l'hôtel. (...) Nous, quand on sera partis, l'appartement... je ne sais pas ce qu'ils vont en faire", redoute M. Lemaire, qui vit dans un appartement de six pièces au lieu de deux, depuis le départ de ses voisins.
Utopia "ne s'est pas fait sans heurt", convient Frédéric Panni, conservateur du patrimoine et directeur du Familistère. Mais "il y avait un défaut d'entretien depuis des décennies au palais social, qui comptait un taux de vacance de 30% en 1996. Loin de chasser les habitants, c'est le programme Utopia qui permet qu'on continue à l'habiter", insiste-t-il.
Pour Fernand Patte, 83 ans, né au Familistère, les habitants "ont été mis devant le fait accompli. On leur a dit +On va racheter votre appartement, vous allez habiter dans l'appartement qu'on va vous donner jusqu'à votre mort+. C'est une expropriation".
"Heureusement, les gens ont été relogés", poursuit-il, assis sur un banc, sa canne à portée de main, évoquant les souvenirs "heureux" de son enfance et l'"oeuvre de Monsieur Godin".
Sa plus grande crainte: "quand les Familistériens nés au Familistère ne seront plus là, l'histoire sera déformée".
http://www.lepoint.fr/societe/le-familistere-de-guise-se-vide-de-ses-habitants-09-08-2013-1712761_23.php
un an après il n'en reste plus .....une vingtaine dans l'aile droite !!!!!
RépondreSupprimerBien vu ! Le Familistère, et son Esprit, n' a plus rien à voir avec ce qu' il fut. C' est devenu un bâtiment vidé de son âme, ses âmes !!! dont quelques malheureuse subsistent et je suis très triste our elles. Quand on pense à la vie qui s' agitait dans ses trois bâtiments ( Central ). Mais bon ! Et bien d' accord, une fois les vrais Familistériens partis, l' histoire sera reprise et déformée par les touristes Bobos qui viendront le visiter.
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